La maison du bonheur
Locataire depuis près de 11 ans, Monique voit aujourd’hui son fils Pierre accéder à la propriété. Après avoir réussi de brillantes études, Pierre va permettre à sa mère et son frère polyhandicapé de vivre sereinement les prochaines années dans ce qu’ils appellent « la maison du bonheur ».
Notre soleil est Charles. Il ne pouvait rien faire mais il a fait bouger tout le monde pour lui. Je suis fière de mes enfants bien sûr mais je suis aussi fière de la Fondation car ce sont eux qui nous ont donné les moyens d’être là où nous sommes aujourd’hui. C’est la maison du bonheur.
Pour quelles raisons la Fondation est-elle intervenue pour vous aider la première fois?
Cela faisait huit ans que nous étions dans une situation très compliquée. A l’époque j’avais 6 enfants petits, dont un enfant handicapé, j’étais divorcée, seule, et mon ex-mari ne payait pas de pension alimentaire. Nous étions très mal logés et je ne trouvais pas de solution adaptée au handicap de mon fils Charles qui est en fauteuil roulant.
Il grandissait, il avait 10 ans et dormait au premier étage. On était 7, il fallait à tout prix que nous trouvions une solution. J’ai fait des demandes de logement à la mairie mais c’était très difficile car on cumulait deux handicaps : la famille nombreuse et le handicap de Charles. On me proposait des logements HLM qui étaient en étage et qui n’étaient absolument pas adaptés.
Après plus de 8 ans de recherche et d’attente, la mairie, qui ne voyait pas d’issue, m’a mise en relation avec la Fondation pour le Logement Social. En les rencontrant j’ai tout de suite été écoutée. Après un an de recherche, on m’a proposé une maison. Au début je ne voulais pas la prendre car elle n’était pas adaptée, mais on nous a dit qu’il n’y avait pas le choix et qu’on allait faire les travaux nécessaires pour l’adapter au handicap de Charles. Nous aurions raté l’affaire de notre vie, j’aurai fait une énorme erreur de refuser cette maison.
Quelles aides avez-vous reçues pour faciliter votre quotidien et celui de Charles ?
Il s’agissait de deux petites maisons avec un petit jardin, mises en vente par un particulier dans une agence. Il y avait beaucoup de monde qui voulait acheter mais le vendeur a accepté de le vendre à la Fondation après nous avoir rencontrés avec Charles.
Il a fallu installer un ascenseur à l’extérieur et pratiquement tout l’intérieur a été refait. Des murs ont été cassés, ils ont fait une nouvelle salle de bain. C’était de gros travaux. C’est devenu un logement idéal pour le handicap de Charles et pour une famille nombreuse. Quand on est entré dans la maison, c’était extraordinaire, mes enfants n’y croyaient pas, nous avons vécu un vrai moment de bonheur. Nos n’avions pas d’argent mais dans ce logement on avait l’impression d’être privilégiés. Aujourd’hui, je serai encore dans la galère sans la Fondation, j’en suis certaine.
La salle de bain
a été adaptée
dès 2004 au handicap
de Charles.
Depuis un an, une nouvelle étape marque l’histoire qui vous lie à la Fondation.
Oui, c’est arrivé d’une façon étonnante, il y un an j’étais invitée pour les 25 ans de la Fondation. J’ai entendu la directrice dire : « Notre plus grande réussite c’est quand nos locataires sont en mesure de racheter le bien ».
Moi je ne savais pas qu’on pouvait racheter, personnellement je ne le pouvais pas financièrement mais j’ai pensé à mes enfants et j’ai abordé le sujet avec eux. Il faut savoir qu’auparavant mes enfants avaient des difficultés à étudier car ils étaient entassés dans des pièces avec du bruit etc. Tout d’un coup ils se sont retrouvés dans les conditions optimales pour réussir : de la place, du confort, du calme, chacun a pu être tranquille pour étudier. Plus grands, ils ont tous fait de très bonnes études, ils ont chacun emprunté à la banque pour financer leurs études. Aujourd’hui, trois sont ingénieurs, l’un travaille à Londres dans la finance et la petite dernière termine ses études d’architecture. Il y a eu à la fois le handicap de leur frère qui leur a donné envie de réussir et bien sûr les bonnes conditions propices au travail.
Pour moi c’est grâce à cette maison et donc grâce à la Fondation que mes enfants réussissent socialement aujourd’hui. C’est mon fils Pierre qui a pris la décision de racheter la maison, il est ingénieur. Au début l’idée l’a un peu effrayé par rapport à son jeune âge (29 ans), il avait déjà remboursé 30 000 euros d’emprunt pour son école et sa vie étudiante, et bien sûr il a des envies de fonder une famille et de pouvoir subvenir à ses besoins. Il a réfléchi pendant un an et finalement il a fait une proposition à la Fondation en disant que cette maison serait pour son frère et moi. Tous mes enfants trouvent ça formidable. Cette décision m’a beaucoup soulagée, même si je sais que la Fondation ne m’aurait jamais demandé de partir.
C’est une fin heureuse car quand il sera propriétaire nous serons logés gratuitement et c’est une solution d’avenir pour toujours. Je souhaite que tout cet espace me permette de recevoir plus tard mes petits-enfants et mes enfants.